Les mythes dans la lombalgie – partie 01

Vous le savez peut-être. J’ai lancé un podcast. Les 3ème, 4ème et 5ème épisodes de ce podcast reprennent le live que j’avais réalisé avec Joshua LAVALLÉE en novembre 2023. Dedans nous y abordons 9 mythes sur la lombalgie véhiculés dans des conférences :

  • Une métastase osseuse c’est une douleur constante on ne peut pas la moduler
  • Une douleur en deuxième partie de nuit c’est un red flag
  • Une sciatique liée à une hernie discale lombaire ne donne pas des douleurs bilatérales 
  • Une hernie discale donne une douleur principalement dans la jambe
  • La douleur pendant une activité s’explique par la mise en contrainte
  • Sur les lombaires McKenzie c’est vraiment essentiel
  • Le test d’instabilité lombaire identifie si les muscles arrivent à bien immobiliser le segment douloureux
  • Le MODIC c’est un marqueur, quand il est là on sait que c’est ça
  • Le CSI permet d’identifier une douleur nociplastique

Dans ce billet de blog je vous donne le support écrit que nous voulions vous partager pour le 3ème épisode et les mythes en gras : les mythes concernant le triage.

Les mythes concernant le triage

Mythes dans la lombalgie (avec Joshua Lavallée) Part 01 – TalKin’ Moutarde – Épisode 03

Mythe : Une métastase osseuse c’est une douleur constante qu’on ne peut pas moduler

Il s’agit ici d’un des mythes de l’ancienne compréhension du corps. Si vous êtes bien formé sur la douleur, normalement vous devriez savoir qu’on peut moduler TOUTES les douleurs. Aucune atteinte à l’intégrité physique ne s’accompagne obligatoirement de douleur. Pour vous exemplifier cela, nous vous avons pris 2 rapports de cas issus de la littérature scientifique.

  • Douleur à comportement mécanique :
    • Évènement initiatique (port de charge)
    • Horaire mécanique, symptômes intermittents
    • Réponse à la kinésithérapie
    • Réponse aux antalgiques (tramadol)
  • Cancer du poumon ayant métastasé en L1
  • Douleurs lombaires hautes
    • Apparaissant en position assise
    • Améliorées par la position debout
    • Reproduites par la flexion et inclinaison homolatérale
    • Reproduites par le spring test sur L1-L2
    • Abolies complètement par 10 extensions répétées en procubitus
    • L’amélioration ne durait pas entre les séances

La subtilité est que : même si une douleur qu’on ne peut pas moduler par les mouvements est un bon indicateur de problème plus grave, la réciproque n’est pas vraie. L’effet placebo peut bloquer la douleur, peu importe quels facteurs causent de la nociception, s’il y en a.

Mythe : Une douleur en deuxième partie de nuit c’est un redflag

Ce mythe n’est pas faux stricto sensu. Par exemple dans les recommandations 2019 de la HAS sur la lombalgie, il est écrit directement dans la liste des red flags :

Mais la clinimétrie de ce signe montre bien qu’on ne peut vraiment pas conclure quoique ce soit à partir de celui-ci sur la présence d’une infection :

La présence d’une douleur nocturne seule est un faux positif dans 96% des cas.

Les ratios de vraisemblance sont catastrophiques :

En fait, le problème vient peut-être du fait que l’infection a une faible prévalence et ce signe serait peut-être meilleur pour indiquer la présence d’une pathologie rhumatismale inflammatoire associé à d’autres indices, mais nous n’en sommes pas sûrs.

Cela relève d’un problème plus global des drapeaux rouges, mais ça reste un outil clinique parmi les meilleurs que nous avons. Il faut juste intégrer d’autres facteurs dans le raisonnement et pas simplement une checklist de drapeaux rouges.

Autre référence pertinente sur ce sujet : Cook CE, George SZ, Reiman MP. Red flag screening for low back pain: nothing to see here, move along: a narrative review. Br J Sports Med. 2018 Apr;52(8):493-496

Mythe : Une sciatique liée à une hernie discale ça ne donne pas des douleurs bilatérales

En fait nous n’allons pas trop nous apesantir mais celui-ci fait partie des mythes les plus incompréhensibles car il est doublement faux. Déjà dans un raisonnement simpliste ou hernie discale = compression et où compression = douleur, eh bien selon la position de la hernie le contact pourra se réaliser de manière à toucher les deux côtés, comme par exemple dans le cadre d’une hernie médiane.

C’est d’autant plus étonnant que ce mythe soit véhiculé, que l’une des principales pathologies que nous devons écarter et que l’on nous a rabâché encore et encore, est le syndrome de la queue de cheval. Pour rappel le syndrome de la queue de cheval est souvent issu d’une hernie et déclenche des symptômes bilatéraux.

Mais en plus, au-delà de ce raisonnement simpliste, la neuro-inflammation qui contribue aux symptômes douloureux a tendance à se balader et donner des symptômes controlatéraux.

Enax-Krumova, E., Attal, N., Bouhassira, D., Freynhagen, R., Gierthmühlen, J., Hansson, P., Kuehler, B. M., Maier, C., Sachau, J., Segerdahl, M., Tölle, T., Treede, R.-D., Ventzel, L., Baron, R., & Vollert, J. (2021). Contralateral sensory and pain perception changes in patients with unilateral neuropathy. Neurology, 97(4), e389–e402.

Et il n’y a pas que les douleurs qui peuvent être déclenchées de manière controlatérale, la perte de fonction nerveuse également.

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